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Sans crier gare, mais avec un talent flagrant, Teofilo Chantre s'affirme avec ce nouvel opus comme un grand interprète en langue française. Compositeur capverdien reconnu, notamment pour ses chansons millésimées chantées par Cesaria Evora, l’auteur s'est imposé depuis une quinzaine d'années comme un des artisans essentiels du succès de la musique capverdienne à travers le monde.

Outre ses talents de compositeur, Teofilo Chantre poursuit une chaleureuse carrière en solo, entamée en 1993 avec l’album "Terra & Cretcheu", en marge des modes et autres courants éphémères de la société spectaculaire. Ancrée dans la saudade, ce sentiment atlantique où se mêlent le regret, le désir et le chagrin, la musique de Teofilo Chantre exprime le départ à quatorze ans de son île natale de São Vicente pour l'Europe et les nombreux allers/retours qui ont suivi. Musicien depuis trente ans, Chantre atteint aujourd'hui une maturité impressionnante, à la fois comme interprète et comme compositeur de classiques capverdiens.

Sixième album studio d'une discographie où les références aux voyages et à la terre natale abondent, "meStissage" est certainement son disque le plus ouvert et abouti à ce jour. Tout en épure acoustique et en mélancolie atlantique, ces treize chansons flânent hors des sentiers battus, en route vers un généreux métissage musical. Ouvrant l'album, Tu verrais traduit ainsi un artisanat délicat et vrai. Teofilo y chante en français dans une langue à la douceur de vivre évocatrice de la morabeza capverdienne que souligne l’accordéon doux-amer de Jacky Fourniret qui l’accompagne depuis ses débuts.

Déjà présent sur "Viaja", l'album précédent, un autre complice Marc Estève cosigne cinq morceaux de ce disque. Le surprenant Entre-temps dresse une vision lucide d'une société où la technologie numérique prend inexorablement le pas sur les relations humaines franches. Les arrangements de corde et le piano d'Un Monde Honorable, qui évoque le souvenir de Nougaro, mettent en valeur le chant naturellement fluide de Teofilo, parfois effleuré, toujours incarné, atteignant une harmonie touchante entre paroles et musique.

Rencontré à l’occasion de l’écriture d’Elle Chante, le duo qu’il a réalisé avec Cesaria Evora, Bernard Lavilliers rejoint Teofilo sur Oli'Me Ma Bô, le temps d'un couplet émouvant sur les difficultés de l'exil, exprimant encore et toujours une saudade sublimée. Teofilo excelle dans les chansons bleues, comme Allem Disso, Lua Desencantada ou Alma Morna, à l'effacement exquis. Son sens inné de la mélodie, combiné à un jeu largement acoustique, sonne toujours vrai, renvoyant à la saudade contenue de l'adolescent de Mindelo, qui quitta son île pour emprunter des chemins d'exil, en remontant l'Atlantique.

Tous ces chemins se croisent et se délient au Restau de l'Exil, véritable auberge lusophone de sentiments vrais et profonds. Teofilo ne triche pas avec sa musique. Il reste fidèle à son parcours, ses convictions et à ses émotions. La mélancolie s'évanouit instantanément lorsque les premières notes se font entendre : "Nostalgie dort tranquille, tout le monde va danser". Et nous de même, tout au long de ce "meStissage" habité à souhait.

 


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Teofilo

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Photos Roswitha Guillemin